15 mai 2015

Descente sur Ashkabad

Mise à jour en léger différé pendant mes 2 jours de repos à Nukus, après traversée du Turkménistan et visite du cimetière de bateaux de l'ex mer d'Aral.


La frontière Iran / Turkménistan sépare 2 mondes très différents. C'était une des frontières entre les sphères d'influence des ex-empires britannique et russe.

Türkmen milli tansymyz : "Küşt depdi" (chœur et danse traditionnelle turkmène)

Côté iranien, population aryenne, langue indo-européenne, alphabet dérivé de l'arabe, riz léger qui ne colle pas, thé noir, moutons comme chez nous, WC propres avec douchette, et accueil chaleureux et prévenant. Côté turkmène, population mongoloïde, langue turcophone, alphabets cyrillique et latin (selon l'âge des panneaux ou du rédacteur, car une récente réforme a introduit l'alphabet latin à la place du cyrillique), riz pilaf plutôt gras, thé vert, moutons à fesses proéminentes, WC parfois réduits à un trou dans le sol, et accueil glacial.

Douane et taxi obligatoire pas gratuit

Alors que les garde-frontière iraniens nous remercient de notre visite et s'inquiétent surtout de savoir si on a bien aimé l'Iran, on sent vite qu'on n'est pas vraiment bienvenus au Turkménistan. 5 contrôles de passeports en 30 mètres, agents aimables comme des portes de prison, et tout ça pour découvrir qu'un oukaze interdit de faire à vélo la belle descente (-1300m de dénivelé) sur Ashkabad car c'est une "zone militaire".

Zone frontalière interdite aux vélos...

Avec Luis, cyclo-voyageur péruvien arrivé juste devant moi, nous boudons le taxi obligatoire payant et trouvons refuge dans le camping-car nantais d'une famille marseillaise fort sympathique (voir leur blog intitulé untouracinq). Pas le bon plan de la semaine... On s'est retrouvés coincés dans le camping-car jusqu'au contrôle des camions aux rayon X, soit un détour de 45 km escortés par un militaire qui a pris place à bord du camion jusqu'au contrôle de sortie de zone-frontière, et qui nous interdisait de faire une pause en route ou de photographier. J'ai donc vu, sans pouvoir vous rapporter de photo, un petit troupeau de magnifiques Akhal Teke, le cheval du désert turkmène. Et en plus, pour l'inspection du camping-car, attente un peu longuette pour cause de jour férié. En effet, les pays d'ex-URSS commémorent la fin de la 2e guerre mondiale le 9 mai, car à l'heure de la capitulation le 8 mai à Berlin, il était passé minuit à Moscou.

Trajet avec escorte militaire vers le poste de contrôle des camions

Bref, on s'est pointés à la frontière à 8 h mais il est déjà 15h30 quand nous entrons enfin, ébahis, dans Ashkabad, à 55 km et 1300m plus bas.

Ashkabad. Avenue vide pleine de vigiles.

Hymne national turkmène

Ashkabad, centre ville, quartier du palais présidentiel

Luis décide de partir rapidement, il est prêt physiquement et mentalement à traverser tout le long à vélo si nécessaire. La famille Girard et moi, nous partons explorer un peu le centre-ville à la recherche respectivement de gas-oil ou d'une banque avec distributeur de billets.

Les faubourgs ressemblent à n'importe quelle ville d'Asie centrale ex soviétique, à part que les voies express sont plus surdimensionnées, et bordées de lampadaires design impeccablement propres. Mais le centre est juste hallucinant.

Ashkabad. Banque nationale turkmène

Le vaste quartier où se trouve le palais du Respecté Président et toute une tripotée de ministères et autres administrations est surréaliste. On voit une quantité de grands et somptueux immeubles en marbre blanc, construits majoritairement par Bouygues, le long d'avenues très larges et apparemment vides.

Mais en fait pas tout-à-fait vides : on y trouve en moyenne un policier en "uniforme civil" (pantalon noir, cravate, chemise blanche, talkie-walkie à la main) tous les 50 m, de chaque côté de la rue ; plus des policiers en uniforme classique devant chaque bâtiment officiel ; plus des policiers chargés de la circulation, ou plutôt, d'empêcher la circulation sur les avenues réservées aux véhicules officiels.

Ashkabad, centre-ville. Astiquage du mobilier urbain.

Les seuls êtres humains non policiers peuplant ces rues sont les nombreux employés chargés de l'entretien : balayage des trottoirs, balayage des rues, découpage des brins d'herbe qui dépassent dans les pelouses, astiquage des barrières, des réverbères, et des abribus vides, polissage des monuments. Le tout à la main. Et comme il y a nettement plus de préposés au nettoyage que de passants susceptibles de salir les rues, le centre-ville est tellement propre qu'on croirait être dans une maquette géante, ou sur une nouvelle planète où la poussière n'existerait pas encore.

Une équipe de balayage d'avenues au centre d'Ashkabad

Une nana d'un commando-balayage m'a abordée en russe, en passant dans un carrefour pendant que j'attendais le feu vert : son job n'est pas bien payé, mais elle ne trouvait pas d'emploi dans sa ville natale Dashoguz (environ 500 km au nord), alors elle est venue astiquer la capitale. Notre brève conversation n'a duré que le temps d'un feu rouge.

On n'a le droit de photographier ni les bâtiments du gouvernement, ni les policiers. Et des policiers, il y en a partout, comme sur cette photo, dans le coin en bas à gauche :

Une photo dont l'original a été supprimé sur ordre du vigile

Alors on essaie de faire discret, soit en poussant le zoom au maximum, soit au contraire en grand-angle ou avec le smartphone en déclenchant sans viser, soit en dupliquant très vite les photos dans un autre coin de carte mémoire avant que le policier le plus proche inspecte les dernières photos pour nous faire effacer ce qui ne lui plait pas.

Ashkabad. 2 étudiantes en uniforme Juste avant la nuit, je me suis éloignée un peu en direction d'une avenue où il y avait de vrais gens sur les trottoirs.

Deux étudiantes en uniforme (la couleur varie selon les établissements) m' ont indiqué un restaurant. Il y avait de délicieuses aubergines farcies, de la bière turque, la télé russe et un groupe de femmes qui dansaient, et qu'il ne fallait pas photographier (voir photo suivante). Y avait aussi du wifi mais pas question de donner le code d'accès aux clients étrangers de passage...

Féte dans un restau d'Ashkabad

Aprés tout ça, je vais rejoindre le camping-car untouracinq pour la nuit sur le parking de l'hôtel 5* Oguzkent : je squatte dans leur camping-car, car les hôtels acceptant les étrangers sont chers à Ashkabad.

Ashkabad by night

14 mai 2015

Lettre du Sovietistan

Pas le temps de profiter longuement du wifi de mon hôtel à Nukus, je repars en excursion avec 2 touristes russes et un espagnol, en taxi partagé, pour voir le cimetière de bateaux de la mer d'Aral.

Je suis sortie du Turkménistan dans les temps.

Yerbent. Centre du village à l'heure de sortie de l'école.

Nury Hudaygulyev (?) : "Ayly aghsam"

Je ferai prochainement 2 mises à jour, une avec quelques photos qui ont échappé à l'effacement par la Police turkmène, et une avec des infos pratiques pour les quelques égarés qui se préparent à transiter par la route Ashkabad - Konye Urgentch.

En attendant, pour vous faire patienter, une petite lettre du Sovietistan dont diverses variantes traînent dans la littérature spécialisée.

Ponçage et nettoyage manuel d'un monument d'Ashkabad, devant une pub Kärcher...

A l'aéroport Charles de Gaulle, deux techniciens de Bouygues discutent. L'un part s'établir au Turkménistan, et son meilleur ami est venu l'accompagner. En attendant le départ de l'avion, celui qui s'en va tente de convaincre son copain de venir le rejoindre. Mais son ami, hésitant, lui dit :

Yerbent centre-ville — Écris-moi, dis-moi comment c'est. Si c'est bien, je viens te rejoindre. Mais, ajoute-t-il après un instant de réflexion, on va convenir d'un code. Suppose que tu ne puisses pas m'écrire librement, eh bien, tu m'écris à l'encre rouge, comme ça je me méfierai.

Trois mois plus tard, il reçoit une lettre d'Ashkabad. C'est une lettre de son ami, écrite à l'encre bleue. Il y décrit le Turkménistan en termes paradisiaques: Bouygues construit ici une multitude de bâtiments magnifiques avec les plus beaux marbres, ça rapporte un fric fou, les conditions de travail sont bonnes, et on peut faire tout ce qu'on veut pendant ses loisirs. Enthousiasmé, il est prêt à faire ses valises, mais son attention est attirée par un post-scriptum en bas de page :

— PS : iI n'y a qu'une chose qui manque à mon bonheur, de l'encre rouge.

Signalisation routière typique en ex URSS, habituellement plutôt en région de montagne...

9 mai 2015

Course contre la montre

Pour une fois, je triche un peu : j'utilise la fonction du serveur hébergeant ce blog pour publier à une date et heure programmées à l'avance, parce que je n'aurai guère le loisir de surfer sur le net au Turkmenistan. J'ai donc préparé cette page depuis le cafe-net ouvert le vendredi matin à Quchan, ma dernière étape avant le poste frontière de Bajgiran.

Premiers moutons d'Asie Centrale, reconnaissables à leurs fesses proéminentes, dans la chaîne du Kopet Dag

Quand cette page paraitra, je serai très probablement à Ashkabad. Je circulerai tête nue et sans manto.

Alty & Kuba : "Sayadyn"

Mon programme : retirer des manats (ou au pire échanger une poignée d'euros contre des manats), chercher si je peux réserver un taxi Darvaza - Konye Urgentch le 13 mai, boire une petite bière (une vraie, avec alcool), manger, prendre des photos des grandioses immeubles en marbre blanc, et faire le plein d'eau avant de m'élancer vers le désert du Karakum avec un vélo chargé à bloc, vu que je m'attends à voir seulement 3 points habités, avec eau potable donc, en 260 km. Ensuite, taxi ou camion-stop, car d'après ma carte et quelques infos glanées sur un forum, aucun ravitaillement possible sur les 200 km suivants...

Traces de lézard dans le Karakum

8 mai 2015

Khoda negahdar

Voila, je suis dans un cafe-net à Quchan, c'est la fin du tronçon Iran de mon voyage. Je passerai la frontière à Bajgiran tôt demain matin, pour ne pas perdre de temps sur mes 5 jours de visa turkmène.

Arrivée à Bajgiran, poste frontière iranien. De l'autre côté, le Turkménistan.

Je repars une nouvelle fois d'Iran avec l'envie d'y revenir, et peut-être de repasser voir quelques-uns de mes hôtes, dont certains sont de véritables amis. Et qui sait, peut-être un jour aurai-je le plaisir d'accueillir certains d'entre eux en France...

Alireza Ghorbani: "Tasnif saghi", album Sarve ravan

Le morceau de musique en annexe (ou ci-dessus), c'est un de ceux qu'Ahmad, un de mes premiers hôtes près de Shiraz l'an dernier, m'avait copiés sur mon petit baladeur mp3. C'était le premier morceau que j'avais écouté en roulant sur les hauts plateaux semi-désertiques, entre Tashk et Kerman. Merci pour ce petit cadeau que j'ai beaucoup apprécié. Et merci à tous mes hôtes iraniens.

Ahmad et sa tante tadjike m'invitent à mettre la main à la pâte pour faire du pain lavash, mar. 2014

Je ne suis pas prête d'oublier ma rencontre avec Ahmad : après quelques minutes de discussion au bord d'une route tranquille, Ahmad et sa femme Hodjat, qui m'avaient doublée en voiture, et s'étaient arrêtés pour me saluer, m'ont invitée chez eux. Mais ils habitaient à une trentaine de kilomètres. J'ai remercié Ahmad, mais je lui ai dit qu'avec mon vélo chargé, je n'allais pas vite, et je ne pourrai pas arriver à Abadeh Tashk avant la nuit. Ahmad m'a alors proposé de m'emmener, moi et mon vélo, dans sa petite Peugeot 205. C'était tentant, mais j'avais très envie de profiter encore un peu de cette magnifique journée pour longer le lac salé à vélo. Alors j'ai de nouveau décliné son invitation en disant je passerai le lendemain dans son village. Ce que je ne savais pas encore, c'est qu'Ahmad n'était dans ce village que pour le week-end, en visite chez ses cousins. Alors, il m'a proposé une meilleure solution : il allait emporter mes sacoches pour que je puisse à la fois profiter de cette belle fin d'après-midi, et rouler un peu plus vite pour le rejoindre avant la nuit. Et voilà comment j'ai confié mes 4 sacoches à un automobiliste inconnu !

Lac salé de Tashk et bergers nomades à moto, mar. 2014

Cette année, quand j'ai envoyé un SMS à Ahmad le jour du Nouvel-An persan, j'ai été touchée par sa réponse : lui aussi se souvenait très bien de notre rencontre, et il s'était mis au vélo...

7 mai 2015

Mashhad, veillées d'armes

Mashhad est la 2e plus grande ville d'Iran, mais je l'ai trouvée reposante par rapport à Téhéran.

Mashhad. Dôme doré du complexe Imam Reza.

Mastan & Homay : "Sarzamineh bi karan"

D'ailleurs, il n'est pas si exceptionnel de voir des Iraniens à vélo dans Mashhad, même s'ils sont, comme dans toutes les grandes villes iraniennes, bien moins nombreux que les motos.

Motocyclette iranienne typique. Mashhad.

Il faut juste éviter de séjourner à Mashhad pendant les grandes fêtes de pèlerinage.

Outre la quantité de safran disponible au bazar, les 2 spécificités de Mashhad sont l'ensemble mausolée + mosquée Imam Reza, et le consulat turkmène.

Mashad, autour du mausolée Imam Reza

Le mausolée Imam Reza, relativement peu connu des touristes occidentaux, est le plus grand site de pèlerinage des musulmans chiites, et une des plus grandes mosquées du monde. Les touristes ici viennent plutôt d'Iran, de certains Emirats Arabes, d'Iraq, et du Pakistan.

Mashhad. Imam Reza, une des entrées du site

Le consulat turkmène, lui, attire une concentration relativement élevée de cyclo-voyageurs ou autres routards occidentaux occupés à attendre leur visa de transit. Ainsi, dès le premier de mes 3 passages au consulat, j'ai rencontré 5 cyclistes : Pere le Catalan que j'avais vu à Tabriz, Kim le Coréen, Alexia et Daniel de Bruxelles, et Maxime alias le cyclochard, un autre francais. Tous en route pour le Pamir. Dès qu'on a nos visas en fin d'après-midi, on part se préparer : révision du vélo ou du matelas auto-dégonflant, achat de ravitaillement, lessive, affinement de la feuille de route, repos...

Zurkhaneh à Mashhad. Gymnastique traditionnelle iranienne.

Nous quitterons tous Mashhad dans les 24 ou 48 heures, avec chacun notre visa de transit de 5 jours, mais nous ne ferons pas route ensemble : soit nous sommes décalés de 24 h, soit nous ne passons pas par le même poste-frontière. La rigidité de l'administration turkmène ne nous permet pas de fantaisies : dates et postes-frontière d'entrée et de sortie sont inscrits sur nos visas. Et on sait que si on s'écarte de la route de transit correspondante, on sera rapidement repérés (un vélo avec 4 sacoches Ortlieb ne passe pas inaperçu dans le coin) et remis sur le droit chemin au premier poste de police. Le gouvernement turkmène contrôle tout, sauf le sens du vent. S'il pouvait, il le ferait souffler du sud et nous donnerait seulement 3 jours.

6 mai 2015

Khorasan, le pays du safran

Clavier iranien/qwerty, sans accents, vous les mettrez vous-memes.

Confitures séchées en couches minces

Salar Aghili : "Sabz tasnif", album Sayehaye Sabz

Le Khorasan est une jolie region, assez fertile, vallonnee, partagée entre nord-est de l'Iran et nord-ouest de l'Afghanistan, a la limite montagneuse le long de la frontiere turkmene.

Khorasan e Razavi, vers le nord

Par chance j'ai eu un bon vent de dos sur plus de la moitie du trajet, et il y avait peu de montee et un peu plus de descente (deniveles cumules +700m / -900m).

Khorasan e Razavi

J'ai donc pu sans trop de peine faire en une journee 136 km porte a porte entre Nishapour et Mashhad. Ce sera tres probablement l'etape a velo la plus longue de mon voyage, en kilometrage.

Khorasan e Razavi près de Mashhad.

Le sud du Khorasan est plat, c'est la qu'on cultive les crocus dont on tire le safran. Je n'ai pas vu les plantations de crocus, mais du safran, j'en ai vu des kilos (non, je n'exagere pas) au bazar Reza a Mashhad.

Safran au bazar Reza de Mashhad

5 mai 2015

Planétarium Omar Khayyam

Cet édifice est tout proche du mausolée d'Omar Khayyam, qui est bien signalé, à la sortie Est de Nishapour. C'est le batiment rond derrière la statue d'Omar Khayyam.

Planétarium Omar Khayyam.

Ce que je ne savais pas, c'est que ce planétarium, dont j'avais vu une belle photo sur Wikipedia, en était resté à l'état de chantier... Mon hôte Arash m'a expliqué que ce planétarium avait été victime des restrictions budgétaires induites par les sanctions internationales, et personne ne savait si ce chantier serait terminé un jour.

Planétarium en chantier...

Tout près de ce planétarium en chantier, à quelques centaines de mètres du parc dans lequel se trouve le mausolée d'Omar Khayyam, on peut visiter les mausolées de 2 autres gloires locales, le poète mystique médiéval Attar et le peintre Kamal al Molk (19e siècle). Dans ce deuxième parc, une des boutiques de souvenirs passait de la musique traditionnelle iranienne (cliquer ci-dessous ou sur "Annexe").

Alireza Ghorbani : "Raze del", album Rosvaye zamane

Nishapour. Mausolées Attar et Kamal al Molk.

A propos des sanctions internationales, quelques Iraniens m'ont fait remarquer que les mouvements terroristes qui défraient la chronique dans les pays occidentaux (Al Qaida, Daesh ou autres talibans, qui ont en commun d'être des intégristes sunnites), ne bénéficient d'aucun soutien de l'Iran (l'Iran, république islamique chiite, ne soutient que le Hezbollah libanais et le Hamas palestinien), n'ont pas réussi à s'implanter en Iran, et ne recrutent pas d'Iraniens. Mais à 3 reprises pendant ce voyage, on m'a fait remarquer, avec étonnement et incompréhension, sans aucune agressivité, qu'il y avait des centaines de Français parmi les terroristes de Daesh... Personne ne m'a par contre parlé des caricaturistes de Charlie Hebdo.

Vieiile ville de Yazd. Sous le chador, jeans moulants et talons hauts

Quant aux perspectives de détente et levée des sanctions suite aux récentes négociations de Lausanne, les Iraniens qui m'en ont parlé attendent de voir des améliorations concrètes avant de se réjouir. Ils espèrent très prudemment...

Omar Khayyam e nishapuri

Tombe d'Omar Khayyam

Dang Show : "Fill the blank", album Shiraz 40 saleh

Mausolée d'Omar Khayyam

C'est pour lui que je voulais visiter Nishapour. J'avais entendu parler d'Omar Khayyam pendant un cours optionnel d'histoire et philosophie des sciences quand j'étais jeune étudiante. Je n'avais à l'époque pas bien conscience que tous ces savants aux noms arabes étaient en fait majoritairement persans.

Je ne vais pas vous recopier sa biographie, mais Omar Khayyam (1048-1131) est l'auteur d'un traité sur la résolution des équations du 3ème degré, et un des experts à l'origine de la réforme du calendrier persan. Il a introduit les années bissextiles et en a calculé la fréquence avec une précision meilleure que celle du calendrier grégorien, introduit en Europe 5 siècles plus tard.

En Iran, il est plus connu pour ses quatrains, dont les plus hérétiques ont été classés "non authentiques" par les gardiens de la révolution islamique.

Quand l'arbre de ma vie, écroulé dans l'abîme,
Sera rongé, pourri, du pied jusqu'à la cime,
Lors, si de ma poussière on fait jamais un pot,
Qu'on l'emplisse de vin, afin qu'il se ranime.

Traduction de Abdulghasem Etessamzadeh, Vincent Monti et Amir Hooshang Kavousi Rubbayat et thé au safran

4 mai 2015

Train Téhéran - Mashhad - Nishapour

Hall de la gare principale de Téhéran

Salar Aghili : "Daf mizanam", album Fasle asheghi

Si vous regardez une carte, vous verrez qu'il n'est pas logique de passer par Mashhad pour aller de Téhéran à Nishapour. Mais au guichet de la gare de Téhéran, je suis tombée sur un débutant non anglophone qui m'a vendu un billet pour Mashhad en me disant que de là je pourrai facilement aller à Nishapour.

Train entre Téhéran et Mashhad

Ce n'est qu'une fois arrivée à Mashhad que Samira, passagère du même train de nuit que moi, m'a appris que l'arrêt-prière à 4 h du matin, c'était à Nishapour. Pas grave, au moins j'ai pu dormir jusqu'à 6 h. Les couchettes 1ère classe étaient confortables. Dans chaque compartiment, on avait une bouilloire et du thé ou nescafé, une télé, et un petit pack ravitaillement par personne (biscuits, cacahuètes, jus d'orange et eau). Le seul incident de parcours a été que le bouton "Marche/Arrêt" de la télé était coincé sur "Marche", mais le contrôleur en est finalement venu à bout, ouf !

Compartiment couchette 1ère classe, mixte.

A noter : le compartiment était mixte ; le passager et la passagère que vous pouvez voir sur la photo n'avaient aucun lien de parenté ni avec moi, ni entre eux. Cela fait partie des évolutions réglementaires.

Il y en a eu d'autres : un policier n'a plus le droit de vérifier si un homme et une femme sortant ensemble sont membres d'une même famille, ni de fouiller le sac des dames (je vous laisse deviner qui porte discrètement la bouteille de vin ou de vodka quand un couple iranien veut emporter un peu d'alcool pour un pique-nique). Une femme iranienne majeure non mariée est maintenant libre de voyager à l'étranger ; enfin, si elle arrive à avoir un visa. Obtenir un visa Schengen, même pour un séjour touristique de courte durée, est très difficile pour les Iraniens. Le nombre de visas est contingenté, et on leur demande entre autres un justificatif d'emploi stable et un dépôt correspondant à 120 € par journée de séjour en France, alors que le salaire d'un instituteur iranien est à peine 300 €/mois.

Hall d'attente de la gare de Mashhad

A Mashhad, Samira m'a invitée à prendre un thé au buffet de la gare, puis avec un des barmen, m'a aidée à prendre un billet pour Nishapour, puis surtout, à monter mon vélo dans le train. Pour une fois, le contrôleur en chef n'était pas commode. Je ne sais pas ce que le barman et Samira lui ont raconté, mais ils ont dû insister pour que je puisse embarquer mon vélo...

Train+vélo : Samira et le barman à la rescousse

A l'arrivée à Nishapour, un policier désœuvré a contrôlé mon passeport (ça m'est arrivé 3 fois sur les petites routes du Mazandaran) puis m'a souhaité la bienvenue. Nishapour est une ville à taille humaine (environ 600 000 habitants) et j'ai eu l'agréable surprise d'y voir plus de vélos dès ma 1ère heure ici qu'en 10 jours à Téhéran.

Cycliste nishapouri

1 mai 2015

Kashan et le Dasht e Kavir

Kashan.Toits et badgirs vus du toit du hammam.

Kashan. Bagh-e Fin. Pour redescendre d'Abyaneh, Sharareh m'a déniché un véhicule : elle a reconnu sur la place du village une conductrice qui promène régulièrement des touristes dans la région. Et par chance elle était presque prête à partir, avec à bord Andrea, une touriste allemande qui veut visiter quelques sites que je n'avais pas vus l'an dernier, à Kashan ou à proximité. Nous partageons donc ce taxi toute la journée.

J'ai revu avec plaisir les jardins Bagh-e Fin, avec leur superbe petit parc irrigué par de petits canaux et des fontaines alimentés sans aucune pompe.

Homayoun Shahjarian : "Eshgh az koja" (album Nasim-e vasl)

Hammam de Kashan.

Nous avons visité le hammam où Amir Kabir a été assassiné (je ne sais plus très bien qui était ce personnage, mais de nombreuses villes iraniennes ont un boulevard ou une place à son nom), et une des belles maisons historiques que je n'avais pas encore vues, la maison Borujerdi.

Une grande maison historique de Kashan. Je ne me souviens plus laquelle, elles sont toutes belles.

Plus que les multiples fioritures, ce qui m'impressionne dans ces grandes maisons traditionnelles, c'est le talent des architectes iraniens pour maintenir l'intérieur frais et aéré quand il fait chaud, voire très chaud, dehors.

Kashan. Encore une belle maison historique dans le cenre ancien.

Puis on s'est offert une petite virée dans le désert du Dasht-e Kavir.

Dasht-e Kavir entre Kashan et Marenjab

On a pu voir de près un petit troupeau de dromadaires près de Maranjab, et toutes seules comme des grandes, nous avons brillamment réussi à sortir la voiture du bout de piste où elle s'était ensablée.

Piste près de Maranjab. Au fond, lac salé sec et brume de chaleur

Puis retour en bus à Téhéran. Mes 2 hôtes tehéranis Ali et Delila ont été vraiment épatants : ils se sont arrangés pour que je puisse récupérer tout mon barda et ma nouvelle CB au même endroit... Ça tombe bien, puisque cette nouvelle CB, qui remplace celle piratée à Istanbul, me permettra d'attendre les 2 nouvelles CB qui vont remplacer celles qui étaient dans la pochette porte-monnaie que je me suis fait faucher à Téhéran. Il ne me restera plus qu'à trouver un distributeur qui marche à Ashkabad... si le Turkménistan m'autorise à passer par Ashkabad.

Maranjab. On écrit avec les doigts de pied dans le sable chaud, la guide en alphabet latin et moi en alphabet persan

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