Transit par le Turkménistan

Je vous renvoie à la page >> Visas : procédures << pour les modalités pratiques, qui, justement, ne sont pas pratiques.

Ashkabad. Les rues (vides) autour du palais du Respecté Président sont sous bonne garde

Interprète non identifié : "Ajayyp turkmen sazy"

Les spécificités du visa turkmène font du Turkménistan le principal casse-tête des cyclo-voyageurs le long de la Route de la Soie. Voyez aussi ce site, assez complet et maintenu à jour : Caravanistan.


Mise à jour 2023 :

le Turkménistan ré-ouvre ses frontières, mais uniquement avec un visa de tourisme, c'est-à-dire sous la surveillance d'un guide agréé dont les services sont facturés assez cher.


Mise à jour 2020 - 2022 (désormais périmée) : Turkménistan fermé pour une durée indéterminée

Mauvaises nouvelles : le Turkménistan, seul pays au monde à avoir déclaré zéro cas de Covid-19, n'a pas seulement fermé ses frontières aux touristes potentiellement infectés, mais également à des importations alimentaires potentiellement contaminées (souvenez-vous, le Président turkmène est mégalo et paranoïaque), alors que le Turkménistan ne produisait qu'environ 50% de sa nourriture. Ces restrictions sur les importations sont peut-être aussi dues au fait que, pour des raisons que je ne connais pas, le Turkménistan a perdu des contrats de vente de gaz avec 2 de ses 3 principaux partenaires commerciaux, Russie et Iran, d'où une pénurie de devises convertibles. Enfin, comme si ça ne suffisait pas, un été caniculaire et un hiver rigoureux ont réduit la production agricole nationale (blé -30%, par exemple).

Résultat : pénurie de produits alimentaires de base, taux d'inflation et chômage à 2 chiffres, rationnement et queues pouvant atteindre plusieurs heures dans les magasins d'Etat, disputes pour des sacs de farine ou des bouteilles d'huile dans les boutiques pratiquant le "marché noir"... Le Respecté Président sortant Berdymuhamedov-1 partageant le pouvoir avec son fils Berdymuhamedov-2 promu nouveau Président, il n'y a guère d'espoir d'amélioration spontanée de la situation. A part une minorité d'apparatchiks corrompus à l'abri du besoin, les Turkmènes s'efforcent juste de survivre, ou, s'ils le peuvent, quittent le pays, mais c'est plus difficile pour eux de sortir que pour nous d'entrer :-(


Mise à jour 2019 : 2 pays riverains accessibles sans visa

Les ressortissants de l'UE peuvent maintenant entrer au Kazakhstan et en Ouzbekistan sans visa pour un séjour de moins de 30 jours. Cela simplifie les contraintes de date quand on demande un visa de transit turkmène avec sortie par le nord.


Visa de transit

Le visa de transit turkmène est un visa de 5 jours (ou parfois seulement 3, ou très exceptionnellement 7), à dates fixes. On ne peut déposer la demande que quand on a déjà les visas du pays précédent et du pays suivant. Et le visa de tourisme est assorti de contraintes lourdes et coûteuses. Pour couronner le tout, en 2016-2017 le Turkménistan s'est mis à retoquer environ la moitié des demandes de visas de transit, alors que jusqu'en 2015, l'année où je suis passée, c'était facile.

Premier aperçu d'Ashkabad depuis la route menant, sous escorte militaire, au contrôle RX du camion de mes hôtes

Fort heureusement, le taux de rejet des demandes de visa est retombé à un niveau assez faible en 2018. Mais au cas où le gouvernement turkmène redonne des consignes restrictives, comme c'est de nouveau le cas en février 2020 à cause de l'épidémie de covid-19, il sera plus sûr de demander le visa turkmène suffisamment longtemps à l'avance pour pouvoir organiser un plan B en cas de refus.

Si on doit sortir du Turkménistan vers un pays où un visa est exigé, cela oblige à figer les dates entrée/sortie du Turkménistan plus d'un mois à l'avance :

  • car il faut en tenir compte pour vos demandes de visa du pays précédent et suivant,
  • et parce que contourner le Turkménistan au dernier moment, ce n'est pas si simple : à l'ouest, y a la Caspienne et ses ferrys aux horaires élastiques, pour ne pas dire erratiques ; à l'est, l'Afghanistan ; et plusieurs pays limitrophes exigent un visa non délivré aux frontières, y compris en transit... Du coup certains voyageurs finissent par aller d'Iran en Ouzbekistan (ou inversement) par avion :-( et y a même pas de vol direct (du moins, début 2018 il n'y a toujours pas de vol direct, mais ça pourrait venir : la diplomatie ouzbèke s'assouplit depuis le changement de président en 2016).

Choix d'un itinéraire de transit

Ce choix doit être fixé dès le dépôt de la demande de visa. Les 2 postes-frontière d'entrée et sortie seront inscrits sur le visa dans votre passeport ; c'est souvent ceux que vous demandez, mais pas toujours. Si vous vous présentez à un autre poste-frontière d'entrée que celui inscrit sur votre visa, vous serez probablement refoulé (j'ai connaissance d'au moins un cas de motard refoulé).

Principaux axes de transit à travers le Turkmenistan

Pour moi, aucune hésitation puisque je venais d'Iran, et je voulais voir Ashkabad, le cratère de Darvaza et Nukus. J'ai demandé — et obtenu — un visa de transit Howdan - Konye Urgentch (ou Hawdan, ou Gaudan : c'est juste en face du poste-frontière iranien de Bajgiran). J'avais lu que certains voyageurs n'avaient pas obtenu le transit par cette route, ils avaient dû passer par Sarakhs-Farab. Pour essayer d' éviter ça, j'avais préparé une belle lettre polie en russe, expliquant au Consul pourquoi je voulais passer par Darvaza. Je ne sais pas si elle a été utile : Luis, que j'ai rencontré au poste-frontière de Howdan, avait obtenu le même visa de transit que moi, au même consulat, sans lettre de motivation.

Ashkabad. Parfois, des signes de vie aux balcons des grands immeubles en marbre blanc.

Cet axe Howdan - Konye Urgentch est moins fréquenté que l'axe Sarakhs - Farab, un peu plus à l'est entre Mashhad et Bukhara. L'axe Sarakhs - Farab est plus facile à vélo : 470 km en territoire turkmène au lieu de 580, et les tronçons sans ravitaillement sont plus courts. Il permet de visiter les ruines de la cité antique de Merv (à propos, y a aussi quelques ruines "Patrimoine mondial Unesco" à Konye Urgentch), et de rencontrer un peu plus de Turkmènes en chemin.

Visite du site de Konye Urgentch juste avant de sortir du Turkménistan

Juste pour info, il existe théoriquement une autre route de transit si on vient d'Azerbaïdjan : elle consiste à arriver par un ferry Bakou - Turkmenbashy. La difficulté est alors de pouvoir embarquer à la bonne date une fois qu'on a le visa. Paraît que c'est pas simple. Ensuite, la sortie la plus proche, le long de la Caspienne, oblige à faire un long détour en plein désert au Kazakhstan.

Les transits "en diagonale" Turkmenbashy - Konye Urgentch ou Howdan - Farab sont théoriquement possibles, mais ça fait pas loin de 700 km en territoire turkmène, et la petite route directe Turkmenbashy - Konye Urgentch est une piste, probablement en assez mauvais état. Tout ça en 5 jours, avec entrée et sortie aux heures d'ouverture des douanes, c'est pas gagné !

Yerbent. Ecoliers en uniforme sur la place du village.

Enfin, le poste frontière avec l'Iran tout près de la côte Caspienne (Askh Tappeh / Aq Kala) est ouvert au transit, mais la route correspondante oblige à faire, là encore, presque 700 km en territoire turkmène, tout ça pour arriver par Bekdash en plein désert kazakh. Personnellement, je déconseillerais ces 3 derniers itinéraires longs (les 2 diagonales, et la côte Caspienne) pour des cyclo-voyageurs.

Transports en commun ou camion-stop

Un autocar relie quotidiennement Ashkabad à Dashoguz ou Konye Urgench. Dans le sens sud-nord, il part tôt le matin d'une station proche du bazar Tolkuchka, au nord d'Ashkabad ; je ne connais pas les horaires en sens inverse. Des marshrutkas font aussi ce trajet pour environ 60 MTM par personne, soit un peu moins de 20 € (+ supplément vélo à négocier). Le taxi est évidemment bien plus cher, d'autant plus que le conducteur facturera un retour à vide (en 2015, ça pouvait monter jusqu'à 250-300 € pour un trajet complet en 4x4, à partager entre les passagers si vous êtes plusieurs).

2 des 5 dromadaires qui ont fait la course avec moi pendant 30 km

Il est tout-à-fait possible d'emprunter ce bus et de se faire déposer à Darvaza, puis de terminer à vélo. J'avais renoncé à cette option car je préférais faire à vélo la moitié sud du trajet, plus facile (points d'eau le long de la voie ferrée + villages de Bakhordak et Yerbent, et route en bon état).

La manip "inverse", aller à vélo jusqu'à Darvaza puis terminer en bus après avoir vu le cratère, est plus aléatoire car on ne peut pas être sûr qu'il restera des places libres dans le bus. J'avais aussi renoncé par avance à l'idée de tout traverser à vélo, car par cette route, il y a 600 km entre les postes-frontière iranien et ouzbek, et on doit passer ces 2 frontières en heures ouvrables, et je voulais prendre un peu de temps pour admirer "les Portes de l'enfer" à Darvaza.

Le camion-stop est possible, mais n'attendez pas le dernier moment pour vous y mettre. Parfois des conducteurs vous proposeront spontanément de vous embarquer, parfois ils refuseront même si vous leur demandez, car théoriquement, seuls les professionnels "agréés" ont le droit de transporter des étrangers.

D'Ashkabad à Darvaza, la route et le voie ferrée sont proches

Enfin, alors que je croyais qu'il n'y avait que du fret sur cette voie ferrée, j'ai appris que quelques voyageurs, avec ou sans vélo, avaient emprunté un train de nuit Ashkabad - Daşoguz. Ce train fait un arrêt vers 1 h du matin à quelques km de Darvaza (halte ferroviaire d' Içoguz). Vous pouvez trouver les horaires en russe ou en anglais sur le site officiel Türkmen demiryollari (TDY). Si j'avais su, j'aurais peut-être pris ce train au départ d'Içoguz, mais j'aurais raté un joli lever de soleil sur le cratère (mon visa ne me permettait pas d'attendre le train du lendemain)...

Il y a aussi des trains réguliers entre Ashkabad et Turkmenabad, et entre Ashkabad et Turkmenbashi.

Pour plus d'infos sur le Turkménistan et l'Asie Centrale en général, voir le site Caravanistan

Et je regarde passer les trains. Encore du fret.

Publié le 9 mai 2017 par Moi

Annexes