25 août 2015

Après moi le déluge

Zhugom : "Турд донд а джон зеб хид"

Pont frontalier d'Ishkashim et site du marché tadjiko-afghan

Maintenant que je suis sortie du Tadjikistan, je peux vous en dire un peu plus que ce que raconte le site officiel que vous avez très très bien fait de ne pas consulter : les "conseils aux voyageurs" du ministère des affaires étrangères semblent avoir pour principal but de vous inciter à rester cloîtrés en France pendant toutes vos vacances. C'en est une honte, à quel point ce site manque d'objectivité pour certains pays (en particulier l'Iran), et tarde tant à mettre en ligne des mises à jour quand un problème est réglé... Mais il y a quand même eu quelques perturbations dans le Badakhshan tadjik cet été.

Un affluent du Pyanj a emporté un pont côté afghan

Comme la plupart des voyageurs, je serais bien allée faire une petite visite au marché transfrontalier tadjiko-afghan d'Ishkashim qui a habituellement lieu le samedi. Hélas lors de mon passage, un vendredi en début d'après-midi, le pont sur la rivière Pyandj était fermé et on m'a dit qu'il n'y aurait pas de marché.

Pont et poste-frontière fermé à Ishkashim.

J'ai appris un peu plus tard que cette fermeture faisait suite à un affrontement entre sunnites afghans et ismaëliens pamiris un précédent jour de marché il y a quelques semaines. Mais différentes explications ont circulé, difficile de savoir laquelle était la plus vraie... Ce qui est sûr, c'est qu'un petit groupe armé de talibans s'est installé à une cinquantaine de km à l'ouest de Khorog, au bord du lac Shiva.

Garde-frontière revenant de la cueillette d'abricots

Un peu plus en amont dans la vallée, une patrouille de garde-frontières m'a offert des abricots (mes derniers fruits frais pour 3 semaines), mais le lendemain matin, constatant que j'avais bivouaqué dans un champ avec une belle vue sur la rive afghane, le chef m'a expliqué qu'il ne voulait pas que des touristes bivouaquent à portée de fusil de l'Afghanistan. Parfois les patrouilles délogent les cyclo-campeurs, mais il y a suffisamment peu de soldats par km de route pour qu'on puisse la plupart du temps bivouaquer tranquilles et sans risque (les Talibans ne sont encore jamais arrivés à s'installer dans le corridor de Wakhan).


Mise à jour : triste nouvelle... Fin juillet 2021, les Talibans ont pris le contrôle de la province afghane du Badakhshan, y compris, pour la première fois, le corridor de Wakhan. :-(


Patrouille de garde-frontière dans le corridor de Wakhan

Quelques jours plus tard, peu après Langar, j'ai rencontré une autre patrouille de garde-frontière dont le chef était fort embarrassé : un de ses soldats avait disparu, sans bagages mais avec arme. Ce jeune officier m'a demandé si j'avais des jumelles, il m'a emprunté mon monoculaire quelques instants, a scruté les environs, et me l'a rendu en m'expliquant, l'air résigné, que s'il ne retrouvait pas son soldat, il irait au trou.

Région frontalière désertique entre Langar et Kargush. L'orage ne va pas tarder à passer de la rive afghane à la rive tadjike

J'en ai profité pour lui demander si je pouvais bivouaquer un peu plus loin en contrebas de la route, là où je voyais le terrain s'aplanir un peu : il m'a répondu que oui, il n'y avait pas de danger, son soldat manquant était un brave type. Le lendemain matin, ils ratissaient encore le secteur à la recherche du soldat disparu. Je ne connais pas la suite de l'histoire. Je ne sais pas si ce soldat a déserté pour aller s'enrôler comme mercenaire en Afghanistan, mais cette hypothèse me semble plus probable qu'une attaque de loups ou de léopard des neiges...

Cantonnier tadjik dans un camion tout-terrain

Ensuite, j'aurais bien aimé revenir d'Alichur à Khorog en taxi collectif pour voir le festival international de folklore pamiri "Le toit du monde". Hélas, cet été le Gorno Badakhshan a été plus durement touché que les années "normales" par des inondations et glissements de terrain, car à la fonte des neiges et glaciers s'est ajoutée une quantité inhabituelle de pluie. La route M41 a été coupée en aval et en amont de Khorog : un pont cassé (mais assez rapidement réparé) près de Vanj, et un gros glissement de terrain près de Barsem, qui a coupé non seulement la route mais aussi le cours de la rivière Gunt, provoquant la formation d'un petit lac à la stabilité incertaine...

M41 à l'ouest d'Alichur : déviation, route coupée à 180 km

D'autres petites routes ou pistes transverses ont été coupées, et les passages de gué étaient parfois difficiles. J'ai rencontré des touristes tchèques dont le 4x4 est resté coincé une journée complète dans un gué au sud-est d'Alichur : ils ont marché jusqu'à la M41 pour demander le secours d'un camion.

Convoi de ravitaillement contournant la coupure de la M41 via Kargush

Des dizaines de maisons ont été endommagées et évacuées. Le président tadjik est venu se montrer à Khorog en hélicoptère et a décrété l'état d'urgence dans le GBAO. Du coup, le festival 2015 a été annulé. En fouillant sur le net, je découvre qu'il a finalement été reporté d'un mois, donc a eu lieu peu après mon retour en France. C'est un moindre mal.

Route M41 au nord-est de Murgab après les orages de début août

Enfin, d'autres orages dans l'est du Pamir ont provoqué des glissements de terrain près de Rangkul et une rupture de pont près de Murgab. Le festival de jeux équestres At Chabysh de Murgab a lui aussi été reporté cette année.

Dernières étapes au Tadjikistan

Peu de trafic entre Murgab et la frontière. Ce sont souvent des camions chinois.

Après Karakul, il reste guère plus de 100 kilomètres à parcourir avant de quitter le Tadjikistan.

Shantel : "Қош жылдыз"

Abords du village de Karakul. Collecte de petit bois en side-car.

En fait, on le quitte progressivement, puisque depuis Alichur, la population — très clairsemée — est majoritairement kyrgyze.

Cimetière kyrgyze peu après Karakul

Plus que 2 cols au-dessus de 4000 m : Uy Buluq et Kyzyl Art. Je me déleste de mes derniers somonis tadjiks en les échangeant contre les derniers soms kyrgyzs de Gaël, un cyclo-voyageur français qui a travaillé 6 mois à Bishkek avant de reprendre la route en direction de Dushanbe, via le Pamir.

Rubarbe sauvage près du lac Karakul

On s'est croisés, et on est restés un moment sur la route dans ce beau paysage désolé, pour échanger, outre nos quelques soms / somonis, nos impressions sur ce qu'on avait perçu des différences entre sunnites et chiites dans les pays où on avait séjourné. Avec une même conclusion : un jour ou l'autre, on aurait envie de revenir en Iran et dans le Pamir tadjik.

Entre Karakul et la vallée aride de Markansu, on longe de nouveau la longue clôture barbelée entre ex URSS et Chine

Je fais une autre rencontre surprenante peu après : je revois le grand cyclo-voyageur genevois Claude Marthaler, alias le Yak, que j'avais rencontré à Khorog, mais cette fois il est en voiture ! Il retourne à Murgab avec un caméraman de la RTS pour faire un reportage sur le festival de jeux équestres qui devrait s'y dérouler dans 2 jours.

Lac Karakul vu depuis la montée au Uy Buluq

Cycliste en tenue anti-coup-de-soleil Le premier col est presque facile, malgré un raidillon juste au nord du lac Karakul : il n'est qu'à 300 m plus haut que le lac, et la route est encore asphaltée. Presque, car dans mon sens de parcours, le vent dominant est de face et souffle bien fort... Le paysage commence à devenir vraiment très minéral, à l'exception d'un petit alpage assez vert juste au sommet du col Uy Buluq où je bivouaque sans le savoir à moins de 200 m d'un camion en panne.

Bivouac au col Uy Buluq, 4230 m. En contrebas, on devine la vallée aride de Markansu

Le lendemain matin, dernière rencontre tadjike : Baboy, le chauffeur du camion en rade après le virage suivant, vient me proposer le thé. Il trouvait le temps long : il est là depuis 4 jours. Après la panne, quand il a constaté qu'il ne pouvait pas réparer, il a fait 5 km à pied car il savait qu'on captait de nouveau du réseau GSM un peu avant le lac Karakul, et depuis, il attend la livraison de pièces de rechange qui devraient arriver aujourd'hui par un autre camion.

Baboy et son camion en rade depuis 4 jours, août 2015

Baboy est un ex militaire en retraite. Il a servi en Afghanistan du temps où le Tadjikistan était soviétique, et continue à s'y rendre régulièrement pour livrer des marchandises en camion, car rester inactif chez lui l'ennuie. Quand je lui demande si ce n'est pas dangereux, il répond simplement "J'ai l'habitude". Il insiste pour m'offrir du pain (alors qu'il m'en reste), je le remercie en lui proposant une petite poignée de fruits secs, et il m'aide à pousser mon vélo dans le gué juste derrière le col.

Le tronçon de route entre Uy Buluq et Kyzyl Art est désertique et très dépaysant.

Large vallée désertique de entre les cols Uy Buluq et Kyzyl Art

De hautes montagnes aux roches colorées par divers minerais encadrent des fonds de vallées presque plats et assez larges.

Route M41 dans la vallée de Markansu. Vent tourbillonnant, mais surtout de face....

Le vent (encore de face) soulève poussière, sable et sel, et génère des mini-tornades qui se déplacent de part et d'autre de la route, laquelle redevient piste au moment de monter au Kyzyl Art (4280m).

Zone désertique entre Uy Buluq et Kyzyl Art, district de Murgab

Enfin, en fin d'après-midi, alors que je commençais à douter de pouvoir passer le Kyzyl Art avant la nuit, j'aperçois la ligne de crête de roche rouge qui annonce le col (kyzyl, en kyrgyze, c'est rouge) et j'arrive au poste frontière, puis à la frontière juste au col, 2 km plus haut. Mon dernier 4000. A la fois soulagée d'en finir avec la traversée des hauts plateaux du Pamir, et triste de quitter le Tadjikistan.

Kyzyl Art, 4282m. Dernières vues sur le Pamir tadjik

22 août 2015

Karakul, le lac noir turquoise

Entre Ak Baïtal et Karakul

Asankan Jumakmatov : "Кыргыз оймолору"

Traces de yourtes au pied du col Ak-Baïtal

A partir de la descente du col Ak Baytal sur Karakul, j'ai enfin eu du beau temps ! Et les paysages étaient grandioses.

Pic Muzkol (6129m) vu depuis la M41 peu avant Karakul

A vrai dire, cette grandiositude est difficile à rendre en photo. De même que la rapidité avec laquelle les éclairages changent.

Lac Karakul et lumières de fin d'après-midi

Photo à la con... Cycliste et tête de yak Faut bien que les cyclistes qui se fatiguent sur la M41 avec le vent de face, en bouffant des nouilles tous les jours, aient un petit avantage sur vous, qui regardez les photos depuis votre fauteuil...

Lac Karakul (3920m)

Karakul-les-Flots. La plage est tranquille Ak en kyrygze, ça veut dire blanc. Kara, c'est noir ; Karakul signifie "lac noir", mais souvent, il a une belle couleur turquoise.

J'ai presque hésité à me baigner, mais y avait un petit vent frais.

Karakul, lac et entrée du village

Karakul est aussi le nom du village perdu au bord de ce lac, à 3900 m d'altitude.

Karakul. Mosquée au centre-ville

On se demande ce qu'il fait là, car à part une source d'eau potable et un superbe paysage, il n'y a vraiment pas grand chose d'attractif.

Etendage à linge en pylone recyclé

Le lac est trop salé pour contenir des poissons comestibles, aucun fruit ou légume ne pousse dans le secteur, et l'herbe est trop maigre pour nourrir les yaks qui sont en alpage dans une autre vallée.

Karakul, centre-ville en début de matinée

Douches du gîte Saadat à Karakul Saadat, Kyrgyze tadjik de Karakul. Mais il y a une caserne, et 3 maisons ou yourte d'hôte pour les touristes de passage, dont la chaleureuse maison de Saadat avec sa confortable salle de bains (faut juste demander 1 h à l'avance pour qu'il fasse chauffer les bassines à la bouse de yak).

C'est à lui que j'ai donné les quelques médicaments qui restaient dans ma trousse de secours. Et comme je cherchais mes mots pour lui expliquer en russe à quoi servait quel médicament, il m'a dit simplement "Ne t'inquiète pas, ma fille est infirmière à Murgab, elle en fera bon usage".

20 août 2015

Le col le plus haut

Shantel : "Өмүр"

On en était donc à Murgab et son pont cassé.

Pont devenu gué suite à des orages

J'ai eu de la chance au passage du gué. Après avoir chaussé mes sandales Vibram et hésité quelques longues minutes, j'allais commencer à me mettre à l'eau, bien boueuse et froide, un peu en amont de l'effondrement, là où la rivière était plus large donc moins profonde et/ou avec un courant moins fort. Eh oui, c'est le bon moment pour se souvenir du théorème de Bernoulli. Mais bon, j'étais quand même pas complètement rassurée, surtout qu'il fallait faire au minimum 2 navettes pour passer vélo puis sacoches (le vélo avec 4 sacoches offrirait trop de prise au courant)

Sauvée par un camion de cantonniers !

Et là, un camion tout-terrain kaki de l'ex Armée Rouge acheminant une équipe de cantonniers est arrivé, et m'a transportée jusqu'à la sortie de la zone inondée.

Un motard qui arrivait en face attendait qu'un autre camion se pointe en sens inverse ; ça peut prendre un moment, il y a peu de trafic entre Murgab et la frontière kyrgyze.

Après, yavaipluka monter tout doucement jusqu'au col Ak Baytal, le plus haut du trajet (4655m).

Entre Murgab et Ak Baytal. Arc-en-ciel en fin d'averse.

On longe sur des dizaines de kilomètres une longue clôture barbelée qui délimitait la "zone neutre" entre ex URSS et Chine ; elle est située à une dizaine de km de la frontière proprement dite.

Vallée de l'Ak Baytal et clôture URSS / Chine.

J'ai bivouaqué avec 2 cyclistes biélorusses dans un emplacement de bivouac *** que j'avais repéré avec ma petite longue-vue avant de voir leur tente.

Bivouac à 4300m avec des Biélorusses entre Murgab et Ak Baytal

Anatoliy et Anya prévoient de rouler de Bishkek jusqu'au Caucase en 3 mois, c'est un rythme nettement plus sportif que le mien !

Ak Baytal 4655m : et de 4 (cols à + de 4000m)

Le lendemain j'ai franchi les 5 derniers km à 3 km/h de moyenne, sous une petite pluie fine et fraîche. Pendant ma petite pause au sommet, à 4655m, j'ai vu arriver deux camions qui montaient poussivement, capot ouvert pour aérer le moteur.

Point culminant de mon parcours : col Ak Baïtal, 4655m

Et j'ai interrompu le long tronçon de tôle ondulée de la descente vers Karakul

Descente du col Ak Baytal vers Karakul, le long de la clotûre de la zone interdite entre ex URSS et Chine.

en installant le bivouac dès 15h30 dans un emplacement *** aussi, avec Wicka et Paul, 2 hollandais qui commencent un voyage de 6 mois dans le Pamir puis en Chine.

Bivouac à 4300m avec des Hollandais entre Ak Baytal et Karakul

16 août 2015

Murgab, district des yaks

Sur la route M41 peu après Alichur

Ynak Osmonaliev : "Айлуу Кеч"

Route M41 , sortie Est d'Alichur

J'aurais du mal à expliquer pourquoi, mais rouler à vélo sur les hauts plateaux de cet immense massif est assez planant.

Haut-plateau entre Alichur et le col Naïzatash, juil. 2015

C'est un grand plaisir de glisser tranquillement sur les faux-plats (même s'ils sont parfois montants...), en regardant défiler les sommets en arrière-plan.

Le long de la route M41 à l'est d'Alichur, juil. 2015

D'Alichur à Murgab, la route M41 est encore en bon état et il n'y a qu'un petit col peu pentu (un "+ de 4000" facile, super ! ). J'ai failli bivouaquer au col Naïzatash, c'était beau.

Col Naïzatash 4137m

Mais comme il était encore tôt, et que les nuages noirs du sud semblaient vouloir se rapprocher, j'ai continué jusqu'à Mamazaïr, où ma carte indiquait un petit village avec homestay. En guise de village il y a 3 maisons et une yourte. Mais on peut effectivement être hébergé au choix dans une des maisons ou dans la yourte.

Yourte-stay à Mamazaïr.

J'ai opté pour la yourte. La famille d'accueil m'a préparé un thé avec pain et yaourt de yak, puis un plov.

Fin de journée à Mamazaïr. Hiver sera rude, homme kyrgyze stocker bouses de yak..., juil. 2015

J'ai profité des beaux éclairages de fin d'après-midi et j'ai assisté à la traite des yaks.

Mamazaïr : 3 maisons et 1 yourte.

C'est un peu plus sportif qu'avec les vaches. Il faut amorcer la pompe en laissant le bébé yak téter un petit peu, puis lui ôter les pis de la bouche pour traire la mère, à qui on a préalablement entravé les pattes. Et un bébé yak, c'est moins docile qu'un veau et ça devient vite costaud...

Traite des yaks à Mamazaïr

Ensuite, comme presque chaque nuit, il a plu. La yourte a un peu pris l'eau, mais pas du côté où mes hôtes avaient installé mon couchage. Après le petit-déj au shir tchaï, le thé au lait salé, la maîtresse de yourte m'a massé le dos pour me relaxer du torticolis que j'avais chopé en arrivant à Bulunkul.

Gorges à l'ouest de Murgab

Le lendemain je suis arrivée tranquillement à Murgab, je me suis posée dans l'hôtel qui avait des douches chaudes et un restau correct.

Maintenance de la pompe à eau de l'hôtel : on pourra se doucher ce soir

Je me suis accordé 2 jours de pause, j'ai fait un peu de shopping au bazar (2 briquets, 3 carottes, un concombre, des boules de kurut pas trop dures...) en compagnie de Kay, une énergique cycliste japonaise qui traverse le Pamir en sens inverse du mien, et qui m'a appris qu'un pont venait de casser au nord-est de Murgab.

Murgab

Suite au prochain épisode.

Yaks dans la vallée entre Ak Baytal et Karakul

Arrivée dans le Pamir oriental

Bon, c'était bien la peine que je passe à la boutique Megafon de Murgab pour recharger ma carte SIM tadjik et faire activer l'option Megabyte Onlaïn.

Arrivée sur Murgab

Ça pédale dans la semoule dès que j'essaie de charger une photo. Y a pas de wifi à l'hôtel le plus cher et le plus occidentalisé du patelin (25 $ la chambre avec WC + douche à l'étage), et l'internet-café est en panne.

Dobr : "Жаш акын"

A moins que je trouve par miracle un accès wifi avec un débit correct quelque part, je pense que vous devrez attendre une collection de mises à jour différées quand je prendrai quelques jours de repos à Osh, où je devrais normalement arriver dans une douzaine jours.

Murgab, 2ème plus grande ville du Gorno Badakhshan

Osh est la 2ème plus grande ville du Kyrgyzstan (ville centre 250 000 habitants, agglo 500 000), située à 900 m d'altitude dans la grande et fertile vallée de Fergana et à moitié peuplée d'Ouzbeks. Ça changera de Murgab, 2ème moins petite ville du Gorno Badakhshan tadjik (4000 habitants), située à presque 3700 m d'altitude sur un haut plateau semi-désertique, et peuplée à 70% de Kyrgyzs.

Alichur, première petite ville kyrgyze

Grand confort : un tronçon de route asphaltée !

Après plus de 140 km de piste pénible entre Langar et Bulunkul, quel soulagement de retrouver un grand tronçon de M41 asphalté !

Signalisation tadjike typique sur la route M41 après quelques orages : gros trous en formation...

La route a un peu souffert du niveau inhabituellement élevé des eaux des torrents cet été, mais la signalisation routière s'est rapidement adaptée.

Fin d'après-midi à Alichur. Le troupeau de Taygabek de retour des verts (?) pâturages

Yulya Rutskaya : "Аппак суйуу"

Route M41, km 828. Entrée d'Alichur

Soulagement aussi de trouver un restaurant dès l'entrée d'Alichur, et un poste de soudure chez un voisin de Taygabek, le sympathique et accueillant berger kyrgyze propriétaire du homestay Marco Polo.

Alichur. Préparation du poste de soudure pour ma fourche.

Le poste de soudure à l'arc était alimenté par un groupe électrogène qui fumait bien noir, et le gars soudait sans lunettes...

Alichur en fin d'après-midi

Alichur, vue d'ensemble sur le centre-ville Mais bon, ça marchait pour l'acier, j'ai pu faire ressouder l'œillet de fixation du porte-bagages avant droit. Il était temps : pour éviter que ça craque en route, j'ai fait les 50 derniers km avant Alichur avec la sacoche avant droite sanglée sur le porte-bagage arrière et le sac à dos de la tente sur mes épaules. Conduire un vélo ainsi déséquilibré sur une piste qui secoue, c'est très inconfortable, j'ai chopé un torticolis et une tendinite...



3 gamins d'Alichur sur les vélos de leur grand frère, je suppose

Alichur, gîte Marco Polo. Banya, côté machinerie Alichur, gîte Marco Polo. Banya, côté douche. Pendant ma journée de repos avec cure d'ibuprofène, j'ai pu profiter du banya du homestay Marco Polo, dont plusieurs cyclistes croisés en chemin m'avaient parlé. C'est très rustique, mais parfaitement fonctionnel !

Taygabek reçoit des cousins venus de Bishkek

Pour terminer, Alichur n'est pas vraiment une ville.

Belle lumière avant un petit orage sur Alichur

Mais un grand village de 1800 habitants (sans compter moutons, chèvres et yaks) où il y a plusieurs minuscules magasins, 2 ou 3 homestays et un hôtel-restaurant, après quelques jours dans le désert d'altitude, c'est l'opulence...

Bébé yak au parking à Alichur

15 août 2015

Bulunkul, douche froide et bain chaud

Ne faites pas attention aux dates précises sous le titre de chaque article : les articles sont mis en ligne au gré des accès internet, avec un délai de plusieurs jours. Quand je prends un jour de repos dans un hébergement avec du réseau, je peux ajouter plusieurs articles le même jour, après un plus ou moins long silence.

Un petit lac salé dans la descente du col Khargush vers la M41 Après le col de Khargush on rejoint la route M41 par une piste qui nous donne une belle occasion de méditer longuement sur l'efficacité des phénomènes de résonance responsables de la formation de la "tôle ondulée", puis du fait qu'à vélo (du moins, sans une bonne suspension), on ne peut pas descendre sur cette fichue tôle ondulée à plus de 8 ou 9 km/h...

Entre M41 et Bulunkul

Bulunkul vu du petit col entre le village et le lac Yashilkul Il n'y a quasiment pas d'alpages sur ce versant. Juste quelques petits lacs salés au bord desquels ça sent la saumure.

Comme j'avais le temps de faire le détour, je suis allée au petit village de Bulunkul pour voir le lac du même nom et le lac voisin Yashilkul.

Muboraksho Mirzoshoev : "Сабза ба ноз меояд"

Petit pâturage au bord du lac Bulunkul

Le village de Bulunkul est habité toute l'année mais il n'y a ni fruits et légumes qui y poussent, ni électricité secteur, ni antenne-relais de téléphone.

Bulunkul, centre-ville

Et bien sûr pas d'eau courante dans les maisons, on la tire au puits.

Bulunkul, centre-ville au coucher du soleil avant un orage

Enfants de Bulunkul

Entre les averses, le lendemain, j'ai pris des photos des gamins du village (mais pas avec le smartphone, trop lent au déclenchement pour ce type de photos).

Curieusement, ce village qui subsiste chichement de l'élevage est encore peuplé de Pamiris tadjiks (ils parlent shughnani, le dialecte de la vallée de Khorog), alors que les villages suivants sont tous majoritairement peuplés de Kyrgyzes.

Gamins de Bulunkul après l'averse

Le minuscule magasin du village n'a pas grand-chose en rayon, les habitants achètent farine, patates, carottes et oignons par sacs de 10 kilos à Alichur, à 40 km, dont 16 km de piste en mauvais état (boue ou tôle ondulée).

Bulunkul entre 2 averses. Les enfants jouent dans le village.

Mais une des familles fait gîte dans une grande maison où 2 pièces sont réservées aux rares clients.

Mon refuge pendant les averses à Bulunkul

Ça tombait rudement bien : j'ai pu passer tranquillement à l'abri une journée complète de pluie fraîche (Bulunkul est à environ 3800m), et la soupe était bonne, avec quelques morceaux de carottes et pois chiches.

Bulunkul. Séchage des kurpatchas du gîte au centre-ville

Recharge d'une batterie d'APN avant l'extinction des feux J'ai même pu recharger une batterie d'appareil-photo pendant la tranche horaire où mes hôtes faisaient tourner le groupe électrogène (19h30-21h). Mais ça demande un peu de doigté...

Et enfin, il y avait une chouette salle de bains à 6 km : une source chaude avec vue sur le Yashilkul. Le thermostat n'est pas réglable mais en bouchant le trou de la baignoire avec un pied ou une fesse, on peut prendre un bain à une température très agréable.

Yashilkul et bicoque-salle-de-bains

Manque juste une porte pour protéger du vent quand on sort de l'eau...

Bain chaud au-dessus du Yashilkul

2 août 2015

Montée vers les hauts plateaux

Montée au-dessus de Langar : jonction Wakhan - Pamir

Bartang : "О му Бадахшон"

En amont de Langar, on ne suit plus la rivière Pyandj mais une des rivières qui la forment, Pamir, et on abandonne l'autre, Wakhan.

Gorges de la rivière Pamir en amont du confluent avec la rivière Wakhan

Ça commence par grimper sec jusqu'à un balcon avec vue sur l'Afghanistan et sur les nuages gris quotidiens.

Piste Langar - Khargush. Bain de pieds pour deux-roues.

Le relief s'adoucit ensuite.

Derniers arbustes vers 3500m. Le vallon de la rivière Pamir devient moins encaissé à l'approche des hauts plateaux.

On remonte doucement la rivière Pamir en longeant un étroit ruban vert entouré de monts arides.

Rivière Pamir. La petite cabane de bergers sur la rive afghane est vide aujourd'hui.

Puis on finit par s'en écarter pour une 2ème bonne grimpette en direction du col de Khargush (4344m, c'est "mon premier 4000" à vélo).

Bivouac à 3700m dans un alpage désert une vingtaine de km avant le poste de garde-frontière de Khargush

Pendant environ 130 km, les seules habitations sont 2 bâtiments de garde-frontière et quelques bicoques délabrées parfois utilisées en été comme abris par des bergers et leur troupeau (ça fleure bon le crottin).

Montée de Khargush au col. La piste s'écarte de la rivière Pamir et du Petit Pamir afghan.

C'est ainsi qu'au réveil lors de mon dernier bivouac avant le col, à 4200m, j'ai eu la visite de Zora (15 ans) et sa petite sœur, 2 écolières promues gardiennes de troupeau pendant les vacances scolaires. Zora a tenu à porter ostensiblement son cahier d'école pour la photo.

Zora et sa petite sœur. Pour la photo, Zora a tenu à poser avec un cahier d'école.

Une gâterie : salade de tomate (au singulier). Je garde le concombre pour demain. Conformément à la loi de Murphy, c'est ce tronçon quasi désert qu'ont choisi mes 3 briquets à 3 sous (je n'ai pas trouvé mieux après avoir perdu mon super briquet-torche en Iran) pour tomber en panne coup sur coup. Par chance, Gerard et Betty, un couple de voyageurs hollandais en 4x4, m'avaient donné une tomate, un concombre et une orange, un garde-frontière m'avait offert un pain au dernier poste de contrôle, et j'avais quelques consommables comestibles sans cuisson.

Oy, la fourche a commencé à se fissurer Et c'est aussi dans ce tronçon que j'ai remarqué la petite fissure qui s'agrandissait au niveau d'un œillet de fixation du porte-bagages avant. Sans doute un effet secondaire de la vis perdue dans une précédente descente qui secouait bien aussi.

Cairn juste avant le col de Khargush. Dernière vue sur le Pamir afghan.

La redescente vers la route M41 est assez aride.

Petit lac salé juste avant le col de Khargush

Pyandj, rive afghane

Page publiée bien après mon retour en France, mais je l'insère dans la séquence chronologique pour que ce soit moins confus.


Mise à jour : triste nouvelle... Fin juillet 2021, les Talibans ont pris le contrôle de la province afghane du Badakhshan, y compris, pour la première fois, le corridor de Wakhan. :-(


Premier aperçu de l'Afghanistan, face à Qala i Khum

Homayoun Angar : "Majnun"

Je n'ai pris aucun risque : j'ai juste tourné la bague de mon joujou de luxe (un bridge Leica avec zoom DC Vario Elmarit), et profité du stabilisateur optique qui permet de shooter sans pied aux longues focales.

Corridor de Wakhan, rive afghane

En effet, si le Badakhshan afghan est jusqu'à présent resté à peu près préservé des guerres et des extrémistes talibans qui ravagent l'Afghanistan depuis plus de 30 ans, une mouvance "dissidente" de talibans commence à s'y infiltrer et la culture du pavot refait son apparition (ces 2 fléaux sont corrélés, le trafic de drogue sert à financer l'achat d'armement).

Afghanes conduisant les vaches au champ. Vallée du Payndj entre Voznavd et Shizd

Et comme cette région est peuplée très majoritairement de chiites ismaïlis, elle est délaissée par le pouvoir central, si tant est qu'on puisse encore parler de pouvoir central en Afghanistan.

Ecole de filles à Nusay, en face de Qalai Khum

Le premier village afghan en face de ma route était juste en face de Qala i Khum, c'était un village assez important, avec une école, et des écolières en uniforme

Ecolières afghanes dans le gros village en face de Qala i Khum

La piste était dans ce secteur en assez bon état, mais malgré cela, très peu de voitures et camions y passaient, on voyait juste des motos avec plusieurs passagers

Quasiment pas de véhicules sur la rive afghane, à part quelques motos

ou passagère

Une burqa à moto sur la rive d'en face, en amont de Qala i Khum

Plus loin en amont, la rivière Pyandj serpentait dans des gorges étroites

Sadwad, un verger isolé entre 2 villages afghans

et le chemin afghan n'était pas bien large...

Entre Qala i Khum et Khorog, rive afghane. La piste se réduit parfois à un étroit chemin à flanc de rochers.

Par endroits, la vallée se resserrait et on était tout près des bergers Wakhis afghans.

La rivière Pyandj est parfois très étroite, on pourrait presque toucher l'Afghanistan...

C'est d'ailleurs impressionnant de voir comment la rivière Pyandj pouvait être aussi bien une large étendue d'eau aussi calme qu'un lac, ou un gros torrent en furie, et repasser d'un état à l'autre 2 ou 3 fois le long de son cours.

La piste côté afghan de la rivière Pyandj : y a de l'eau jusqu'au bord, et même plus...

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